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Entretien avec Charlène Cabioch, championne de France de Coffee in Good Spirits 2021

Après une troisième place en 2019, Charlène Cabioch s’adjuge cette année le titre de championne de France du Coffee in Good Spirits, grâce notamment a une histoire construite autour du café du Guatemala et un cocktail signature qui a fait l’unanimité.

Charlène, tu étais arrivée 3ᵉ en 2019, qu’est-ce qui t’a poussé à te représenter en 2021 ?

Ces championnats 2021 étaient l’occasion de présenter un café qui me tient à cœur et également d’améliorer le classement de 2019 grâce à l’expérience que j’ai acquise avec le temps. Les championnats permettent toujours de se retrouver, de faire de nouvelles rencontres et d’échanger autour de l’univers du café.

Tu avais commencé par t’aligner au départ de la Brewers Cup France 2021, et finalement tu remportes l’épreuve du Coffee in Good Spirits !

J’ai fait le Coffee in Good Spirits car c’était l’occasion de représenter le café que je suis allée sourcer au Guatemala. J’ai été barmaid et barista et cette épreuve est un excellent moyen d’allier les deux.

À l’origine, je me suis effectivement alignée au départ de la Brewers Cup, pour aller plus en détail dans la présentation et l’extraction de mon café, expliquer son process, son histoire,… J’ai donc fait la Brewers Cup à Paris en 2021, et j’ai décidé d’enchainer avec le CGIS, en me disant que j’ai de bonnes bases en mixologie et cela m’a permis de reparler une nouvelle fois de mon café, en mettant notamment en avant le producteur et les personnes impliquées.

Justement, tout part du Guatemala… Raconte-nous.

Tout part de rencontres et d’émotions. Ça a commencé par un cupping à Coffea, un coffee shop à Antigua, où le producteur du café, Félix Porrón, était présent également. Il était très attentif aux avis des baristas qui étaient là pour ce cupping, et il cherchait des retours sur ses cafés pour échanger sur leurs notes aromatiques et profils. Il souhaitait simplement des avis sur ses cafés, pour les rendre encore meilleurs. D’ailleurs, le fait qu’il tente des nouveaux process expérimentaux et se lance dans le monde du café de spécialité m’a également beaucoup plu. J’ai trouvé ses cafés incroyables.

L’étape d’après a été de visiter sa ferme, de voir la manière dont il travaille. 1850 mètres d’altitude, montée en 4×4, des parcelles de différentes variétés à perte de vue tutoyées par les grands volcans, des caféiers sous l’ombrage d’arbres fruitiers, le tout en agroécologie… J’ai également voulu faire découvrir une variété endémique du Guatemala : le Pache. C’est une variété que j’ai découverte là-bas et les cuppings ont révélé des aspects vraiment intéressants, boostés par un process expérimental : une acidité effervescente, de la prune, du raisin, du cacao, des arômes complexes…
C’était un lot unique et un café vraiment spécial que j’ai décidé de présenter.

Le producteur de ton café, Felix, a-t-il eu vent de ta victoire ?

Bien sûr ! Et ce qui est super, c’est qu’il a pu suivre ma prestation grâce à la retransmission en live du championnat ! Ça lui fait, et ça me fait extrêmement plaisir d’avoir pu mettre en avant son café et un petit bout du Guatemala. D’ailleurs, pendant les championnats, j’ai fait la connaissance de Jorge, qui est Guatémaltèque et était bénévole, il m’a partagé sa joie de voir son pays représenté au travers du café que je servais ! Ça m’a beaucoup touché et c’est pour ces rencontres que j’apprécie tant les championnats.

Les coktails présentés ont été construits autour de ce café ? Ou c’est à l’inverse, une sélection du café pour bien coller aux coktails ?

J’ai fait mes cocktails pour sublimer ce café et révéler l’histoire qui est derrière. J’ai également sourcé du cacao que j’ai eu envie de marier au café. Je suis aussi allée à la rencontre des productrices de ce cacao, et il y a une grande similitude avec le café : on parle de variétés, de process, comme on retrouve dans la production du café. J’ai utilisé également le Ron (rhum) Zacapa, et pour la french touch, j’ai ajouté de la confiture de cerise maison.

J’ai voulu relier ces ingrédients (café, cacao et rhum) au pays auquel je les ai empruntés, qui est le Guatemala :  » Pays du printemps éternel « 

La cerise relève l’acidité citrique de mon café et on retrouve beaucoup de fruit rouge dans l’aromatique de ce café. Et puis les cerises sont récoltées au printemps… c’est comme ça que j’ai trouvé l’inspiration pour créer mon cocktail « Eternal Spring »

Revenons à la compétition. Es-tu globalement satisfaite ou est-ce que tu te dis que tu as des choses à améliorer ? Que t’ont dit les juges ?

Il y aura toujours des choses à améliorer, mais au-delà de ça, je suis déjà très heureuse d’avoir remporté ce titre. Les juges ont beaucoup aimé mon cocktail signature, ainsi qu’en backstage ! J’ai eu de bons retours en général et des remarques qui me permettront de me corriger et de m’améliorer.
J’ai encore beaucoup de travail auquel je vais m’atteler, car la prochaine fois, ce sera pour représenter la France aux Mondiaux !

Participer une nouvelle fois au CIGS avec l’ancien champion de France qui se représente… est-ce que ça met la pression ?

Évidemment il y a un challenge supplémentaire, mais finalement, quand tu rentres sur scène, devant les juges, tu es concentré sur ta prestation, sur ce que tu vas faire et raconter, sans trop penser à qui est passé avant ou qui va passer après. Globalement, les dés sont jetés quand tu te lances, même si on n’est jamais à l’abri d’aléas ou d’erreurs dans la présentation.

Par ailleurs, j’étais super heureuse de refaire le CIGS avec Hakim (ben Hamouda), car nous avions déjà partagé le podium en 2019. L’ambiance est vraiment sympa, il y a toujours une entraide avec les candidats, ce que j’apprécie beaucoup.

Comment t’es-tu entrainée avant la compétition ? As-tu des mentors ou des personnes qui t’ont aidée pour ta préparation ?

Pour cette compétition, je voulais vraiment bien maitriser mes techniques, notamment faire des shots parfaits, utiliser le bon grammage dans le porte filtre et faire une belle extraction pour un résultat optimal en tasse, et dans les cocktails. Beaucoup de café y est passé, j’en ai conscience, c’est pour ça que c’est important de s’entraîner, mais tout en sachant le temps et les efforts que cela prend pour produire du café vert… il ne faut pas l’oublier ! Tout comme pour les spiritueux.

Pour les concours, il y a des champions qui m’inspirent comme Dan Fellow (champion du monde actuel du CIGS) ou Victor Delpierre, champion du monde en 2013.
Par exemple pour la Brewers Cup, j’ai regardé ce que Chad Wang avait fait, et Emi Fukahori qui a gagné en 2018, en présentant un Lorina qu’elle était allée sourcer au Brésil. J’ai eu la chance de la rencontrer à Paris avec Matthieu (Theis), lui aussi champion (NDLR : voir notre interview par ailleurs). J’ai également travaillé avec Tom (Balerin) ; lors de la création de mes cocktails, il m’a donné des retours pertinents qui m’ont permis de progresser.

J’ai aussi pris inspiration dans mon histoire personnelle et toutes mes rencontres, et j’aimerais remercier toutes les personnes qui m’ont soutenue lors de ces championnats !

Comment prépares-tu les Mondiaux ?

Je suis en train de m’organiser pour pouvoir préparer au mieux ces championnats du monde et représenter la France ! Je prends très à cœur cette magnifique opportunité et je donnerai le meilleur pour représenter mon pays dans cette discipline et les valeurs de l’industrie du café de spécialité avec le café que je choisirai. 

Copyright photo : Nicolas Dubois


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